En voici un : J’étais sous la douche à refaire le monde. Le bain étant l’endroit libératoire par excellence, juste après les chiottes et juste avant la méditation au yoga. Le genre de bulle d’espace-temps où les épiphanies improbables et les idées étranges vous assaillent (et de l’idée à la connerie il n’y a qu’un pas : « Tiens, j’ai une idée ! Merde j’ai fait une connerie… », mais je digresse).
Je suis là donc, en train de faire, sans vraiment m’en apercevoir, de la philosophie de salle de bain – comme on chante sous la douche – au sujet de la pérennité des auteurs et des œuvres, des effets de modes, des réseaux… Et je déclare à un intervieweur imaginaire, du fin fond de je ne sais quel abîme et par la grâce de mes souvenirs de bibliothèque de lycée : « Non, parce que soyons honnêtes, qui va se souvenir de Julien Green ? ».
Et bien me croit qui veut, l’après-midi même, je passe chez nos amis à qui la copine Fred leur a envoyé le dernier Libé… où trône Julien Green himself. Son journal non expurgé a été retrouvé et cela fait grand bruit !
Si je devrais croire à la divination, ça serait le moment. Mais mon imperturbable esprit sceptique s’amuse juste de la coïncidence, elles sont toujours plus faciles à remarquer que les millions de moments qui n’en sont pas.
L’anecdote n’est pas directement liée à Tempérance mais je vous prépare au phénomène qui a pris une certaine ampleur dans ma vie et affectera, d’ici quelques notes, le cœur de l’expérience.