Mon frère aîné faisait de la photo quand j’étais enfant, dans les années 70. J’ai toujours été marqué par ses images. Je pense à une photo en particulier, d’une de mes nièces dans un champ, issue d’une série en couleur. Passée la profonde nostalgie d’un temps irrémédiablement perdu et d’un monde qui n’existera plus, j’en ai toujours retenu la vigueur des couleurs : les yeux bleus de Stéphanie, sa blondeur réchauffée par le soleil couchant, ses vêtements rouges et bleus ainsi que son petit bouquet d’enfant jaune et blanc. Dans le contraste du gilet d’hiver et des fleurs de printemps, on sent la précocité de cette saison en Provence. L’expression décidée de ma nièce – qui a l’air d’expliquer au monde ce qu’il doit penser – finit de poser le tableau. J’ai souvent croisé cette photo, elle trône dans mon panthéon personnel et donc, me construit.
Il y a une dizaine d’années, il m’a offert ses livres de l’époque : L’encyclopédie LIFE de la photographie et un livre de Clergue sur la Camargue. A présent, je me demande si l’origine de sa pratique est liée aux Rencontres de la photographie d’Arles. Clergue en est le fondateur, nous sommes un peu arlésiens, est-ce que tout a commencé là pour mon frère ? Et par ricochet un peu débuté là pour moi aussi ? Il faudra que je le lui demande.
L’encyclopédie – à peine plus vieille que moi – est venue compléter ma collection d’ouvrages et c’est un de ceux que je consulte le plus régulièrement. Je n’en tire pas toujours quelque chose de concret, mais j’ai plaisir à replonger dans le savoir de l’époque. J’admire quelques photos marquantes, et pour continuer à rêver, je fantasme sur les techniques anciennes.